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13 mars 2016 7 13 /03 /mars /2016 06:01
Reflexion sur l'Arbre des Sephirots

La rencontre avec l’Arbre des Sephiroth (l’Arbre de Vie de la Kabbale) est une expérience que le parcours entre le 4ème degré et le 14ème pouvait seul m’amener à faire.

 

En effet, pour moi une telle exploration n’allait pas de soi car je suis de confession juive mais peu instruit de prime abord à la tradition judaïque. La jugeai-je seulement nécessaire ? J’ai donc ainsi été amené à réfléchir sur des symboles issus de la tradition juive autour desquels nos anciens Maîtres ont construit un corpus fort riche qui, précision utile, n’implique pas d’être croyant. Je m’attacherai donc principalement à scruter le symbolisme autant que faire je puis.

 

Il y a, selon les spécialistes, trois façons de lire la Kabbale : la manière profane, claire et simple, le textuel, la manière symbolique et figurée et enfin la manière secrète et hiéroglyphique. Héraclite l’avait dit autrement en évoquant : le parlant, le signifiant et le cachant. Voilà ainsi énoncé le problème posé au Franc-maçon arrivé au 13ème grade et confronté à l’analyse de l’Arbre des Sephiroth, de En Soph, l’infini, l’illimité, l’inconnaissable en Malkuth, le fini, l’accompli, le mesurable. On me pardonnera de n’aborder qu’avec circonspection le cachant et le hiéroglyphique, étant pitoyable hermétiste, d’une part, et sachant, d’autre part, que l’objet de toute recherche nous conduit à poser des interrogations nouvelles n’apportant, le plus souvent que des réponses divergentes en plus d’être résolument transitoires.

 

Quelque chose frappe tout d’abord à contempler l’Arbre, c’est qu’il semble une structure déterminée enfermant en son sein une dynamique interne de diffusion, bref un système, une organisation apparemment féconde: de Kether, la couronne spirituelle à Malkuth, la couronne terrestre, le Royaume. De même il apparaît qu’En Soph est en dehors de cette structure, donc en deçà ce qui fait dire à la Tradition que l’Arbre en est l’émanation. L’infini, bien que par définition réfractaire à tout attribut, se manifesterait pourtant dans les attributs appelés Sephiroth sans se dégrader pour autant.

 

L’infini serait la pensée créatrice absolue se déterminant elle-même comme une mise en abyme puisque pensée de la pensée se pensant et ce indéfiniment, quelque chose comme Dieu ou l’Un ou le Tout, comme on voudra, bref l’Inconnaissable. Encore que qualifier c’est quand même relativiser qu’on le veuille ou non. Par exemple on peut dire à bon droit que l’observateur (l’Homme) est la condition même de l’observé (Dieu, l’Un, le Tout) ce qui amène à avancer qu’il a en fait moins besoin de l’infini que l’infini n’a besoin de lui : le Créateur à besoin que la créature Le contemple !

Je sais, ça frôle l’impertinence, mais bon ! Nous sommes d’évidence en présence d’une énigme, si ce n’est d’une aporie. Doit-on alors nous contenter d’avancer des hypothèses invérifiables ou adopter, transitoirement au moins, le point de vue scientifique en vigueur aujourd’hui ? Sans perdre de vue toutefois que les théories scientifiques ne sont toujours, elles aussi, que provisoires.

Si l’Arbre des Sephiroth procède d’En Soph comme le suggère le schéma et la Tradition, sinon pourquoi en faire état, alors on peut, en langage moderne l’assimiler à cet inconnu en deçà des, pour l’heure, indépassables mesures de Planck, qui font que l’origine de l’aventure cosmique demeure pour nous incompréhensible, son avenir une énigme et son sens, s’il en a un, inconnu (big crunch ou pas big crunch ?). Pour certains, ce serait le Fiat Lux, mais alors Kether serait le démiurge qui engendre d’abord la soumission à l’espace et au temps, la séparation initiale et l’apparition de la dualité sans laquelle la création est impensable et impossible. Que de mystère !

 

L’Arbre nous parle à ce sujet de la Création se concrétisant sous la forme de l’Éclair primordial Ŕpotentialité suprême chargée de la totalité de la matière comme de la totalité des possibles qui irradie tour à tour chaque Sephira, instituant au cours de son expansion l’intégralité des lois de l’Univers et ses interactions. Kether est la racine, la propagation se fait donc depuis elle et de Sephira en Sephira.

Cela implique que si l’homme, symbolisé par l’Arbre, veut retrouver ses origines, il doit entreprendre, en remontant, le chemin inverse et zigzagant.

Notre 13ème degré ne dit rien d’autre qui met en scène la découverte par les trois mages des dix portes, allégories des dix Sephiroth, lesquels aboutissent à la 11ème porte interdite en quelque sorte et que le mot « infini » ouvre pourtant dans une extraordinaire explosion de lumière qui, ô paradoxe, entraîne une plongée dans les ténèbres après qu’on ait pu la refermer.

Difficile ici de ne pas penser au balancement expansion/contraction. Ajoutons que cette porte aurait été ouverte sur l’Ineffable qu’on ne peut ni contempler ni décrire. Il est intéressant de noter que cette exploration a tout de même conduit, selon cette légende, à la découverte du Tétragramme si présent dans notre corpus maçonnique.

 

C’est probablement cela la démarche initiatique : l’espoir chimérique de retrouver l’Unité primordiale pour se fondre et se confondre dans le Grand Tout en partant du fini duel, matériel, pesant et complexe. Notons en outre que ce double mouvement hélicoïdal descendant/ascendant fait irrésistiblement penser à la structure en double hélice de l’ADN.

Depuis que l’Homme réfléchit sur l’Univers qui l’entoure, il s’est posé la question de son unité et de sa propre place dans cet univers. Toutes les disciplines scientifiques, y compris les sciences humaines, se sont coalisées et se polarisent vers ce but, probablement inaccessible, que serait une théorie générale du Tout unifiant l’ensemble des actions et interactions, qui rendrait compte de tous les savoirs et mènerait enfin à la compréhension sans voile, ferait du nébuleux un cristal et où tout serait en pleine lumière ; ou tout serait LA Lumière… l’Absolu aveuglant.

L’absolu étant scientifiquement hors d’atteinte, la métaphysique peut-elle y conduire ?

LAPLACE avait rêvé d’une telle théorie et pensé qu’elle était à portée de main. Il s’était trompé, ce que la physique quantique a établi fermement en introduisant le hasard, l’incertitude, l’imprédictible et l’indécidable, montrant, par là, que ce monde n’obéit pas à un Ordre soumis à des lois strictes, pas plus d’ailleurs qu’il n’est totalement soumis à des hasards ou à des désordres, il relève d’un jeu ultra sophistiqué qui va du chaos à l’ordre et de l’ordre au chaos dans un incessant bouillonnement ordre/désordre/interaction/auto-organisation/poïesis. Le cosmos ainsi envisagé a le charme de la poésie et du mystère.

 

Que de fractures, que de béances dans ce tourbillon incertain et énigmatique qui nous dit la complexité du monde, mais ne nous dit que ça.

De même l’initié cherche les voies spirituelles vers cette chimère insaisissable et fuyante. Mystères insolubles pour l’heure, champs rêvés pour la spéculation ésotérique dont l’étude de l’Arbre fait partie.

 

« Tout l’Univers EST mystérieusement à chaque endroit et à chaque instant du monde. »

disait MACH et à la boutade d’EINSTEIN :

« Dieu ne joue pas aux dés »

, je serais tenté de rétorquer: Dieu peut-être pas, mais la Nature sûrement… sauf qu’elle ne retient que les coups gagnants. Autrement dit, ce qui est, est ce qui a réussi. Ces questions sont affaire de spécialistes, mais je rejoins H. REEVES quand il dit que

« - le big bang, cette singularité, ne doit pas être un commencement pour la science mais un nouvel horizon à dépasser. »

 

N’est-ce pas là le défi que nous proposent de relever l’Arbre des Sephiroth et la présence hors du champ matériel d’En Soph, cette autre singularité ? N’est-ce pas l’invitation à dépasser le matérialisme brut, le parlant, pour envisager la place de l’esprit et aborder le signifiant ?

 

B. D’ESPAGNAT nous y invite :

« … mon métier de scientifique m’a appris que quelque chose nous résiste, qui n’est pas nous. […] J’adhère donc à l’idée d’un Être conceptuellement antérieur à la scission matière/esprit. ».

L’astrophysicien THRIN XUAN THUAN affirme, quant à lui :

« L’apparition de la conscience n’est pas un simple accident de parcours, elle est le reflet d’une profonde connexion entre l’homme et le monde ».

 

Et, pour Edgar MORIN :

« … nous avons quelque chose qu’on peut appeler l’esprit-cerveau lié et récursif puisque l’un coproduit l’autre […] surgit à partir d’une évolution biologique, via l’hominisation, jusqu’à homo sapiens ».

Tandis que Antonio DAMASIO avec sa théorie des marqueurs somatiques lie raison et émotion :

«… le début de la conscience est le ressenti d’un état de l’organisme »

. Ces positions réfutent la séparation radicale esprit/matière en les liant dans la séparation, les interactions et la notion d’auto production. Alors ? Physique ? Métaphysique ? Comment trancher ?

Mais revenons à l’Arbre dont j’ai dit qu’il était une structure à la fois déterminée et dynamique organisant en système fécond, au début de ma réflexion.

À considérer son fonctionnement possible, et sans tomber dans le piège abellien de la Structure Absolue, on voit bien qu’explicitement il suggère l’aléatoire grâce à ses 32 sentiers qu’on peut emprunter selon son inspiration ou l’état de ses recherches personnelles échappant ainsi à toute injonction de passer par ici plutôt que par là.

Nous avons là, contenu dans la structure des 10 sphères, un évident entremêlement de 1001 chemins que peuvent emprunter les hommes en quête d’absolu. Marches et contre marches labyrinthiques, égarements et fourvoiements ; et au bout peut-être l’illumination. Je ne peux m’ôter de l’esprit que ce schéma fait penser à une machine thermique qui produit donc force et mouvement.

 

L’Arbre peut se décrire succinctement comme suit :

· Il est un empilement vertical de triangles structurés sur trois piliers : celui de droite part d’Hochma, la Sagesse, directement issu de Kether, dont j’ai suggéré le rôle de Démiurge, principe cosmique et masculin et abouti à Netzah, la Victoire via Hesed, la Bonté ; celui de gauche, vers lequel se dirige ensuite l’Éclair primordial, part de Binah, l’Intelligence, principe féminin décrit comme la Grande Mère et abouti à Hod, la Gloire via Geburah, la Force. Ces deux piliers symbolisent la séparation, la mutation de l’Adam Kadmon, l’androgyne initial, en mâle et femelle. Le pilier central, part de Kether, la couronne divine, pour aboutir à Malkuth, la couronne terrestre, le Royaume, en passant par Tiphereth, la Beauté et Yesod, le Fondement.

  • Les trois piliers, innervés depuis Kether se retrouvent en Malkuth.
  • Les triangles déterminent 22 sentiers reliant entre eux 10 cercles, d’où 32 possibilités. Chaque cercle porte un nom ; ce sont les Sephiroth. Ces sentiers représentent leur interaction et fonctionnent comme des combinaisons de forces et/ou des zones de transition.
  • Ces triangles ont tantôt le sommet en haut et tantôt en bas, suggérant ainsi que chaque chemin comme chaque zone reste au choix du libre arbitre. Pas de déterminisme au milieu d’un chaos implicite ici Ŕon est libre, on monte ou on descend- malgré la matérialisation des niveaux. Rien de vraiment linéaire, mais du buissonnant, de l’exubérant voire du luxuriant.
  • Chaque triangle est une triade représentant un niveau de manifestations différentes et/ou un seuil dans la progression initiatique.
  • Il semble qu’il comporte 4 niveaux : le monde de l’Émanation, le monde de la Création, le monde de la Formation et le monde de l’Action. Mais certains auteurs parlent d’autres possibilités, jusqu’à 6 et 12. C’est ainsi, par exemple, qu’un certain schéma introduit entre Kether et Tiphereth une Sephira, Daath ou l’Intuition, et au-delà de Malkuth, Klipoth, sensé représenter le monde infra humain, autrement dit le monde infernal…

Cependant, une expérience intéressante reste à faire qui est de projeter l’Arbre séfirotique en trois dimensions en faisant pivoter l’une des colonnes par rapport à la colonne centrale sur 45° pour constater immédiatement un vide : où est le possible quatrième pilier ?

Intéressante question, me semble-t-il, qui évoque le manque, le mot perdu, le je-ne-sais-quoi et introduit le nombre 4.

 

Il y a consensus pour dire que si le trois est le nombre de la synthèse, le quatre, lui, est celui de la totalité puisqu’il ferme l’espace et ainsi ramènerait à l’Unité, ce, qu’entre autres, dit Jung et sa théorie de la quaternité des fonctions.

Pour le chercheur Franc-maçon, il pourrait nous montrer l’être humain placé sur la voie le conduisant à quelque chose qu’il a perdu, mais qu’il cherche et nous invite donc, outrepassant la pensée trinitaire dominante en Occident, à passer de la tentative d’identification à des « vérités » issues de la synthèse à celle de s’intégrer à la « réalité », une réalité énigmatique et cachée dont il a cependant l’intuition. Ce pourrait être la mutation quasi alchimique et la « colonne manquante » serait la colonne de l’Intuition et de l’Intelligence pure, la colonne du Grand OEuvre.

 

Nonobstant cette digression qui, je l’espère, ne sera pas être considérée comme un pur sophisme, revenons à l’observation de l’Arbre.

Il me paraît clair qu’il (l’Arbre) nous suggère de dépasser le desséchant dualisme et nous pousse résolument vers le ternaire qui est tout dynamisme et création puisque la matière est énergie et l’énergie lumière.

Alors, pour se conformer à l’exégèse courante, disons qu’entre En Soph, l’infini, l’incréé, l’indicible, l’Ineffable Principe créateur et Malkuth, le créé, le fini, le matériel, le mesurable, mais aussi l’à-peu-près, l’errant et le complexe, se dresse possiblement l’Homme, minuscule lien entre deux opposés, invité par son intelligence mais aussi par son orgueil à percer les « ténèbres lumineuses », et tenter de pénétrer au coeur du mystère de l’infini pour résoudre l’énigme de la « coïncidence des opposés », posée par Nicolas de CUES qui écrivait aussi:

« […] Toi qui donne la vie et l’être, on te recherche sous divers modes, en divers rites et on te nomme de divers noms ; tel que tu es, à nous tous tu demeures, en effet, inconnu et ineffable, car de l’infini au fini il n’est aucune proportion. ».

 

Il n’est aucune proportion ! La coïncidence des opposés est cette problématique que nous tentons tous de résoudre. C’est un beau programme, encouragé par notre Ordre, bien que l’objectif, je le crains, soit inatteignable.

Pourtant comment éluder l’injonction de la Tradition qui pose l’Homme, en tant qu’être (micro) cosmique et spirituel, doté d’un esprit-cerveau, comme indissociablement lié au destin du macrocosme ?

 

Je pense, quant à moi, que l’Émanation pose d’abord l’existence à partir de quoi surgit le problème de la Conscience. Si le Principe est, sur le modèle pascalien, « une sphère dont le centre est partout et la circonférence est nulle part », nous ne pourrons donc que discourir sur ce qu’est la conscience et en quoi elle peut nous aider à comprendre le monde qui nous entoure.

 

Petit conte philosophique :

Quatre papillons voletaient ensemble à la découverte du monde. Ils virent la lumière d’une bougie et décidèrent ensemble d’aller l’étudier.

Le premier s’en approcha prudemment et revint bien vite effrayé par la chaleur qui s’en dégageait, le deuxième s’en approcha plus près encore et sentit ses ailes entamées par le feu, il revint très effrayé lui aussi, le troisième s’en approcha tant qu’il s’y abîma. Le quatrième eut ce commentaire : « de nous tous il est bien le seul à savoir ce qu’est vraiment la lumière ».

 

Ce petit conte marque pour moi les limites de la recherche hermétique à laquelle je préfèrerai, faute de compétence en la matière, une approche philosophique plus classique.

La question de l’Unité du monde et de l’unité de l’être a aussi occupé les philosophes. À l’origine, la philosophie était fortement marquée par la métaphysique en raison de l’article de foi : « tout est Un ».

 

Les penseurs présocratiques étaient convaincus qu’il existe au fin fond du réel un Principe fondamental ou une substance primordiale d’où toutes choses sont tirées. Position qui achoppait sur l’existence du multiple que ce présupposé, « tout est un », imposait sans l’éclairer.

PLATON avec le mythe de l’androgyne justifie, quant à lui, la séparation et la multiplication et il discoure, notamment dans le Parménide, de ceci, que l’Un n’est pas une pure unité mais une totalité possédant limite et figure puisqu’il est à la fois le « un-qui-est » et « l’être-un » ce qui pose le trois et la suite infinie de tous les nombres. Pour le néo platonicien PLOTIN, l’idée est celle de l’unité de l’Être, qui se disperse à partir d’un foyer central ; il convient donc au philosophe de se libérer des apparences nées de la dispersion et de retrouver l’unité vivante d’où tout est issu.

« Celui qu’on nomme Un est au-delà de toute dénomination et de toute attribution, écrit-il. Tout ensemble partout et nulle part, il n’est proprement ni mesure ni démesure, ni repos ni mouvement, ni mélangé à rien ni absent de rien ».

 

En d’autre termes, l’Un ne s’intéresse pas aux accidents, aux phénomènes ni aux évènements, mais il est présent à tout et en tous. François LARUELLE, dit le « philosophe de la non philosophie », enchérit :

« Radicalement autonome, ne se mesurant ni à la pensée ni au langage, l’Un n’est pas plus pensable qu’impensable, dicible qu’indicible : il ne pose de lui-même aucun problème ».

Autant de philosophes, autant d’approches. Aucun ne m’apporte de réponse définitive, car le défi auquel je suis confronté, celui proposé par de CUES, c’est de penser ensemble l’un et le multiple. Ce que CAMUS, dans Le mythe de Sisyphe exprime ainsi :

« Les deux certitudes, mon appétit d’absolu et d’unité, et l’irréductibilité de

ce monde à un principe rationnel et raisonnable, je sais que je ne puis les concilier. »

Car rien n’est simple dès lors qu’on se heurte au mur de la connaissance et qu’il est bien difficile, en outre, d’échapper à la question de LEIBNIZ : Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?

« C’est le paradoxe suprême de la pensée que de vouloir découvrir quelque chose qu’elle ne peut penser. »,

 

constate KIERKEGAARD. Indécrottable, je confesse, pour ma part, que j’ai quelque mal à penser l’aventure cosmique et celle de la pensée comme le fait d’un dessein providentiel voire sotériologique.

Chemin faisant, il me faut donc avoir recourt à la symbolique sauf à abandonner mes recherches et à rester, stricto sensu, dans un rêche matérialisme entaché de scientisme.

À ce point de ma réflexion, j’accorderais volontiers à l’Arbre des Sephiroth une vertu fondamentale, celle de pouvoir servir d’appui à une réflexion permettant à tout moment de s’évader de la vie courante pour conduire la pensée vers les sphères de l’esprit, vers une méditation sur la Création, sur l’Homme et son devenir, sur la dialogique de la séparation ou de la conjonction matière/esprit ou sur la fécondité créatrice du chaos (Ordo ab Chao), sur la poésie enfin du monde qui nous entoure.

Il revient à l’initié d’en faire son miel puis de « redescendre » sur Terre retrouver les contingences matérielles après avoir puisé intensément dans la pensée universelle (la noosphère au sens morinien) pour mieux diriger sa vie et peut-être devenir un bon Franc-maçon éclairé et ouvert au monde.

 

Raymond ABELLIO, parle au sujet de l’Arbre des Sephiroth de Structure Absolue, à propos de laquelle j’ai déjà dit ma réticence, le qualificatif d’absolu m’étant bien dérangeant, mais je lui accorde que les différents points de vue desquels, selon lui, grâce à la structure de l’Arbre, on peut considérer chaque chose pour ensuite en embrasser toutes les implications et donc en avoir une meilleure compréhension, sont suggérés par cet outil qui invite à la pensée complexe non linéaire ; penser A et B plutôt que A ou B, rassembler plutôt que séparer, envisager les chaînes causales en y incluant les boucles récursives mettant en relation chacune des Sephiroth par 2, par 3 etc.

Un outil qui matérialise en outre le passage de l’équerre au compas et donc suggère la quadrature du cercle, qui fait coïncider la Terre, symbolisée par le carré et le Ciel symbolisé par le cercle, problématique abordée par nous au 5ème grade.

Un outil enfin qui suggère qu’il est donc possible voire même souhaitable que le Maçon entreprenne la remontée du monde de l’Action au monde de l’Émanation quelle que soit sa maturité d’initié, où qu’il se trouve en chemin, quelles qu’en soient les difficultés et sans ce soucier du temps qu’il lui faudra.

Voilà mes BB.°.AA.°.FF.°. une réflexion, ma réflexion, en l’état où elle se trouve aujourd’hui, naissante et lacunaire, incomplète et obscure pour ne pas dire ténébreuse, mais quelle découverte pour moi !

 

En suis-je mieux éclairé et/ou mieux éclairant ?

 

Je n’en sais rien. Ma pensée, cette pensée que j’ai mise en branle, je la voudrais phénoménologique c’est-à-dire dynamique, se construisant peu à peu, en constante évolution et donc éloignée de toute prétention à détenir la moindre vérité.

 

C’est, je crois, à quoi nous invite la démarche progressive que la FM recommande à ses membres. Je tâche de m’y conformer en éternel curieux.

 

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